La théocratie ou comment renouer avec la tradition africaine du pouvoir. Par ASSOUKA

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Le climat délétère institué par les conflits et exactions pour motifs religieux et les influences sur l’opinion publique ne permet pas de parler de théocratie avec toute l’assise nécessaire pour faire passer le message.

Il me semble cependant important de souligner quelques aspects de nos racines qui font défaut à notre identité politique en tant que peuple noir vivant sur le continent et dans les lieux d’établissement de sa diaspora.

L’état de maturité spirituelle de l’humanité est marqué par une personnalisation des messages divins et des quêtes d’accomplissement par des voies spécifiques qui ont fait leur place en marge ou dans le sillage des traditions de révélation monothéistes. La mise à disposition d’une quantité importante d’information relayée par des blogs, forums ou réseaux sociaux a permis à une génération édulcorée ou enrichie (selon le point de vue) par le métissage issu de sa migration économique, de se réconcilier avec sa civilisation et son passé culturel. À défaut de passer les étapes d’initiation traditionnelle souvent offerte à ceux vivants sur la terre mère, les membres de la diaspora peuvent recréer à présent une base de connaissance longtemps voilée, violée ou désavouée par d’autres sensibilités ethniques.

L’Homme noir caractérisant cette résurgence culturelle est soit bien établi dans une spiritualité éclairée ou dans une connaissance historique dépendant de son travail personnel de recherche. La civilisation noire est formée de peuples naturellement croyants dont l’animisme a toujours été le fondement originel avant d’avoir connu des déviances fâcheuses ou de se mêler aux influences issues d’autres religions monothéistes. Oui, l’animisme est une forme de monothéisme marquée par le polymorphisme des manifestations et attributs voire de certaines théophanies. A défaut d’avoir, à titre de vicaires, des prophètes, des messagers, des saints répertoriés dans des livres révélés ou composés, le peuple noir a gardé la trace de dieux, de nombreux moniteurs et élus dans sa tradition transmise par l’oralité. La parole pouvant être considérée ici, symboliquement comme un sang qui uni et alimente plusieurs corps générationnels (logique de diffusion verticale) ou ethniques (logique de diffusion horizontale). Ce grimoire immatériel a été associé à une attitude de soumission à une hiérarchie politique en lien avec le culte au Dieu unique et au respect des lois cosmiques et naturelles. Avant de rentrer dans le panthéon des dieux d’une communauté le moniteur envoyé par Dieu était l’intermédiaire privilégié pour réaliser des actions au nom du Dieu unique pendant son séjour terrestre. Ceci a bien souvent créé la confusion dans l’esprit des croyants qui ont perdu de vue la simple qualité d’intermédiaire tenue par le dieu ou moniteur agissant à titre d’instrument de l’action divine et qui ont perpétué l’attachement aux services rendus par le dieu sans s’en remettre à la souveraineté du Dieu unique.

Cette soumission au représentant légitime du pouvoir et récipiendaire des attributs divins a longtemps garanti la stabilité de plusieurs royaumes, états ou autres divisions politiques par le passé. Elle a également, selon moi, détaché le peuple de l’intérêt de s’impliquer dans l’alternance politique au sommet de l’état. La volonté de Dieu s’appliquant sans doute par le biais de la lignée de ses vicaires qui se mettent à son service et agissent par autorisation et permission.

Avec l’avènement de la démocratie et l’exacerbation des conditions économiques et de vie, le peuple est devenu la proie de convoitises et le siège d’influence dans les stratégies géopolitiques. Les nouveaux leaders politiques tirent profit de ces attitudes naturelles pour influencer le cours de l’exercice du pouvoir dans les nouveaux états apprenant le suffrage universel. Les leaderships naturels des représentants ethniques sont mis en opposition sans que le débat soit porté sur le contenu des programmes. Le tribalisme devient un héritage difficile à refaçonner pour des peuplades rassemblées arbitrairement dans des pays tracés à la faveur d’une conférence où ces réalités ont été le jeu de desseins sans grands traits d’humanité. Autre difficulté de l’éco système politique de nos régions, trop souvent attachées à leurs patrimoines culturels, la multiplication des groupes armés qui servent des causes ou des intérêts exogènes. Ce phénomène présent depuis le temps des indépendances a la vie dure tant la main mise sur les richesses du sous-sol implique de s’assurer un relais fiable pour en favoriser l’exploitation. Ces groupes armés, dont les activités engendrent de nombreuses victimes et déplacements, ne doivent pas être associés aux fils légitimes du pays mais à l’extension d’une influence impérialiste qui se sert des réalités ethniques pour tirer profit des insatisfactions et mauvais passages de témoins dans l’exercice du pouvoir.

L’Homme noir caractérisant la résurgence culturelle doit donc pouvoir puiser dans son identité actuelle (au sens de réelle) et sa spiritualité pour définir une nouvelle façon de percevoir le jeu politique basé sur la légitimité des candidats et des institutions constitutionnelles. La longévité au pouvoir n’est pas plus à craindre que les effets pernicieux des règnes sous le sceau de l’enrichissement personnel et des dérives abusives telles la corruption et l’impunité. L’alternance doit être vue comme une opportunité de renouveler le pacte de stabilité du pays entier en donnant l’occasion à chaque sensibilité ethnique d’enrichir la construction du patrimoine patriotique.

L’élu politique légitime et théocrate est à reconnaitre pour ce qu’il représente en matière d’investissement en pouvoir divin par delà les clivages ethniques et dans le sillage d’une longue tradition de soumission à la hiérarchie guidée par Dieu.

L’avènement de cette nouvelle forme de théocratie est de la responsabilité de l’engagement mature du peuple qui votera selon la perception spirituelle dans la plus grande tolérance religieuse, qui nous caractérise, et sans opposition viscérale. La paix sur le continent implique, selon moi, de renouer avec les systèmes politiques qui ont longtemps garanti la stabilité dans l’histoire de notre civilisation mythique qui a tant influencé le monde.


Cet article a été rédigé par ASSOUKA du blog Le Cri de la Calebasse.
Bio de ASSOUKA : le Mystère du double de l’Auteur. Il est le personnage d’une série de textes qui permettent de suivre et de comprendre une formidable aventure spirituelle dont l’accomplissement permettra à un Peuple de faire résonner Le Cri de la Calebasse.

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