De l’émergence à la renaissance africaine : le rôle de la jeunesse camerounaise par Hiram Samuel IYODI

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jeunesse camerounaise

DE L’EMERGENCE ET DE LA RENAISSANCE AFRICAINE : Le rôle de la jeunesse camerounaise.

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Dans un article récemment paru dans vos colonnes, nous avions procédé à une lecture du rôle de la jeunesse dans les différents processus de construction de notre Nation, à savoir la résistance à la colonisation, la lutte pour l’indépendance et la lutte pour l’avènement de la démocratie. Nous avions alors pu démontrer que ces différentes étapes avaient été principalement menées par des camerounais âgés de 20 à 40 ans, qui avaient su faire passer les intérêts du plus grand nombre avant les leurs. Une partie de ces jeunes était constituée de véritables intellectuels formées par les meilleurs universités et écoles des puissances coloniales tandis que l’autre rassemblait des descendants de chefs traditionnels initiés aux connaissances les plus profondes qu’ont nos sociétés traditionnelles de l’Univers, de l’organisation du monde, de la vie et du devenir.

Une autre lecture de l’histoire, cette fois ci conduite à l’échelle continentale nous apprend que le Cameroun a été l’un des rares pays d’Afrique noire à avoir véritablement résisté à la colonisation. Notre pays sera également l’un des premiers à lutter pour son indépendance alors que la majorité des pays d’Afrique francophone devront leur indépendance à la « bienfaisante volonté» de la France. Le nombre de camerounais assassinés par la France, puis le régime Ahidjo dans les forêts de l’Ouest, du Littoral et du Sud entre 1955 et 1970 en témoigne (on parle de près d’un million de perte en vies humaines, alors que la population camerounaise de l’époque était d’à peine 6 millions d’habitants). L’Afrique en miniature a donc toujours joué un rôle primordial durant les différentes phases d’évolution du continent. Ce ne serait pas utopique de penser que la jeunesse camerounaise d’aujourd’hui a le devoir d’inspirer celle de l’ensemble du continent.

En cette période de profondes mutations pour l’Humanité, en cette période de crise socio-économique mondiale, le salut, l’éveil et l’émergence de la terre des lions indomptables et de l’Afrique toute entière ne peuvent être garantis que par un sursaut patriotique de la génération des 20-40ans.

La majorité des pays d’Afrique francophone se veulent émergents en 2035, et je suis de ceux qui pensent que la véritable renaissance africaine se fera avec nos cultures et nos traditions. Il est d’ailleurs à noter que si le développement émane de la démocratie, cette dernière est façonnée par chaque peuple selon son héritage historico-culturel. Barack Obama rappelle à cet effet dans son discours à Accra en Juillet 2009 que chaque Nation façonne la démocratie à sa manière, conformément à ses traditions et à son histoire.

Notre longue marche vers la prospérité se définit donc d’après moi par les trois étapes socles suivantes

1) La réhabilitation réelle et effective des pères fondateurs : En leur accordant plus de place dans nos livres d’histoire, dans l’éducation et l’instruction des masses et dans le paysage publique, ils serviraient d’exemple d’amour et de dévouement à la patrie. Les jeunes pourraient ainsi s’inspirer de leurs parcours et de leurs engagements pour se mettre au service de la Patrie, c’est-à-dire au service des intérêts du plus grand nombre. En cela, les années 2013 et 2014 devraient être des moments forts de reconnexion avec les deux générations des Pères Fondateurs, et considérées comme le début de cette réhabilitation effective. En effet, nous aurons à commémorer le centenaire de la naissance de Ruben Um Nyobe en 2013 et le centenaire de l’assassinat de Duala Manga Bell, Ngosso Din, Madola et d’autres en 2014.

2) La Quête et la reconstitution de notre histoire et la réhabilitation des traditions de nos peuples : Si la Rivière de crevettes (Wouri qui donnera son nom au Cameroun) fût « découverte » par des explorateurs portugais en 1472, si le tracé du territoire que nous occupons actuellement fut décidé à Berlin en 1885 en notre absence, les groupes qui peuplent le Cameroun y étaient installés il y a déjà plusieurs siècles. Plusieurs légendes attestent de l’occupation de ce territoire par les peuples Bantous autour du 9ème siècle après J.C., après un séjour de plus de 3000ans dans la haute Egypte antique et le soudan. La plupart de nos peuples ont des traditions qui vont bien au-delà du folklore et des superstitions qui nous ont souvent été présentées. Certaines d’entre elles ont su préserver la conception de l’univers, de la vie, de l’être et du devenir qu’avaient leurs ancêtres. Durant les 12000ans d’existence reconnus de nos peuples, nous avons autant apporté à la science et à l’évolution du monde que l’ensemble des autres civilisations. Est-il besoin de rappeler que KEMETA (Terre de KEM, un fils de Noé dont nous serions descendants de mémoire biblique) fut autrefois le berceau de l’astronomie, de l’agriculture, des mathématiques, des sciences physiques ou encore de religions avancées ? Le temps est enfin venu de reconstituer cette histoire, afin que les jeunes africains aspirent de nouveau à la grandeur spirituelle et matérielle de leurs ancêtres.

3) Un plus grand intéressement et un engagement patriotique dans la gestion des affaires publiques: Parce que l’Homme vit en société, ses actions quotidiennes ont un impact direct ou indirect sur l’évolution des affaires de la cité. Il doit de ce fait intégrer ses devoirs et ses droits vis-à-vis de de la famille, du clan, de la tribu et de l’ETAT dès la phase de l’adolescence. Il doit également très tôt prendre connaissance du fonctionnement des sociétés environnantes afin de pouvoir défendre sa patrie dans le contexte actuel de mondialisation et de globalisation. L’Afrique, constituée à plus de 50% des moins de 30 ans, a plus que jamais besoin que ses enfants s’intéressent à son devenir en élaborant des stratégies et en posant des actes concrets dans le sens de l’amélioration des affaires de la cité  et de la défense des intérêts nationaux, régionaux et continentaux; En d’autres termes, l’histoire réclame de nous que nous devenions tous des Êtres Politiques et que nous nous servions de nos connaissances sur l’histoire et les traditions des peuples du Cameroun (et de l’Afrique) et des civilisations qui peuplent la Terre afin de formuler un nouveau modèle socio-économique et politique qui soit propice à notre développement réel et durable.

Comme il a été souligné à mainte reprises dans mon livre « Mes rêves de Jeune…Le Cameroun des 50 prochaines années », j’espère que notre génération saura saisir les enjeux majeurs de notre siècle et que chacun de nous se questionnera plus intensément sur l’apport qui peut être le sien ! Quel Cameroun souhaitons-nous léguer à nos progénitures ? Quels moyens humains, intellectuels et matériels sommes-nous prêts à y investir dès à présent?

La construction d’un Cameroun économiquement prospère, fière de son histoire et de sa diversité culturelle passe aussi et surtout par une plus grande solidarité de la part de sa jeunesse. Le résultat souhaité ne dépend que de notre détermination à réaliser nos rêves, de notre volonté à travailler ensemble et de notre AMOUR pour la Mère Patrie.

Je reste persuadé que nous sommes capables de construire cette Afrique libre, digne et prospère pour laquelle de nombreux patriotes ont versé leur sueur, leurs larmes et leur sang.

Les nombreuses crises traversées ces dernières décennies de par le monde nous démontrent l’urgence de la naissance d’une Humanité nouvelle et comme par le passé, les bases de construction du nouveau monde reposent dans les traditions et les valeurs africaines.

Aimons-nous véritablement tels que nous sommes et réécrivons l’histoire. Le passé et le présent de KEMETA l’affirment, nous ne sommes pas trop jeunes pour BÂTIR !


Cet article a été rédigé par Hiram Samuel IYODI

Bio de Hiram : Ingénieur camerounais de 24ans, auteur de « Mes Rêves de Jeune…Le Cameroun des 50 prochaines années » paru aux Editions Veritas en 2011